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Le grupo Teatro da Vertigem : Entretien avec Antonio Araujo – L'!NSENSÉ
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Le grupo Teatro da Vertigem : Entretien avec Antonio Araujo

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Courant 2015 sortira aux Presses universitaires de Provence, une étude sur le théâtre brésilien à Sao Paolo, sous la direction de Silvia Fernandez et Yannick Butel. L’extrait proposé est l’un des entretiens réalisés à l’occasion de cette étude critique.


Le grupo Teatro da Vertigem…. Antonio Araujo
Entretien réalisé et et traduit par Jean-Jacques Mutin
Avignon, juillet 2013.


Jean-Jacques Mutin : Le « Grupo Teatro da Vertigem » (« Groupe Théâtre du Vertige »), est un des plus remarqués dans la crétaion contemporaine au Brésil. Pouvez-vous dire comment, historiquement, il s´est constitué ?
Antonio Araujo : Nous avons commencé non pas comme un groupe de théâtre mais comme un groupe de recherche formé par des étudiants qui avaient fini leurs études de théâtre à la ECA (Escola de Communication et Arts) de l´ Université de São Paulo. Notre objectif était de faire une étude théorique et pratique de la physique classique (textes de Galilée, Newton…) appliquée au mouvement expressif de l´acteur. Le thème nous paraisssait aride à cause des textes étudiés, nous avons donc dû choisir un dispositif pour expérimenter ces concepts et ce dispositif a été : « la perte du paradis et des mythes dans la question de la création du monde ».
Le travail a duré 6 mois et, ensuite, grâce aux improvisations, a commencé à apparaître un matériau intéressant… et, du coup, le désir d´en faire un spectacle, une pièce, en le transformant, mais en continuant la recherche et en la dirigeant vers la création.
« Paraiso perdido » (« Paradis perdu »), notre premier spectacle de la « Trilogia Biblica » (« Trilogie biblique »), a été créé en novembre 1992, en 1 an et 2 mois.
Deux semaines avant la première, nous n’avions toujours pas de nom pour notre collectif, qui était tout simplement un “groupe d’étude et de recherche”! Nous avons donc voté à partir des propositions de noms que faisaient les acteurs mais aucun ne nous convenait à tous. Puis une actrice a fait une propostion à partir du « monologue du Vertige », un des moments intenses du spectacle « Paraiso perdido »… Nous nous sommes donc professionnalisés comme « Groupe Théâtre du Vertige ».
Dans notre groupe, il y avait différents acteurs de la section « Jeu » de l’université et un dramaturge, Sergio Carvalho, mais en réalité, la question des fonctions n’a jamais été un problème pour nous, parce que le groupe s’est constitué de manière évidente, par affinités électives. Nous n´avions pas d´argent ; les dettes du spectacle ont été couvertes par la billetterie, personne n´a été payé : c´est seulement à partir du « Livro de Jó »[[ Deuxième spectacle de la Trilogie en 1995]] (« Le livre de Job ») que les acteurs ont commencé à pouvoir se payer, avec la billetterie, partagée démocratiquement.
J.-J. M. : « Grupo » (« groupe ») est en brésilien, un terme d’emblée très connoté, empreint d’une tonalité politique que ne recouvre plus vraiment la notion française de « compagnie ». Une telle initiative collective était-elle originale dans le paysage artistique du Brésil ?
A. A. : À la fin des années 1980, on sortait d’une décennie dominée par les metteurs en scène, comme repères ultimes de la scène. Les « groupes théâtraux » avaient une connotation utopique, relevant de la culture hippie. La nouvelle génération des années 1990 a essayé de réunir deux choses : d’un côté, le refus du travail des metteurs en scène de la génération précédente, très égotique, esthétiquement magnifique, mais où la part de création pour l’acteur était infime ; de l’autre, la volonté de repenser autrement l’esprit communautaire des années 1970. Pour nous, au Théâtre du Vertige, il s’est agi, dans un « processus collaboratif », de prendre collectivement les décisions de travail, sans pour autant récuser la spécialisation des tâches.
J.-J. Mutin : D´une manière générale vous pourriez parler de vos processus de création avec le groupe ?
C´est un « processus collaboratif » : la dynamique de travail a une dimension plus horizontale, il n´existe pas de hiérarchie ou, en tous cas une hiérarchie « fluctuante » : en fonction du moment du processus il y a un des pôles de la création qui donne le cap, qui a le leadership. Il y a donc une fluctuation, une circulation…
A. A. : Dans le processus « collaboratif » le maintien de chaque fonction (acteur, metteur en scène, auteur, scénographe, créateur des lumières…) est central mais il existe un contrat initial avec des fonctions définies (ces fonctions peuvent changer d´un spectacle à l´autre). Pour autant qu´il y ait négociations, discussions… les fonctions restent définies, maintenues et elles sont toutes égales.
Les avis artistiques de tous les participants impliqués dans le projet sont sollicités… et pas seulement celui du metteur en scène.
J.J. M : Ça a toujours été la même façon de travailler ou vous l’avez découverte peu à peu ?
A.A. : Nous l´avons inventée peu à peu. La recherche de terrain est un élément important du processus, pour tous les créateurs du groupe. Ça nous donne la sensation de nous faire sortir de notre bulle, car le théãtre est une bulle, et de nous plonger dans la vie, dans la ville. Ça nous imprègne. La relation avec la ville est une relation de désir, celui d´occuper la ville, de faire sortir le théâtre d´un lieu institutionnel donné, exploré, exploité. Et de faire exploser la situation théâtrale pour l´espace public.
Cette expérience de la ville, elle s´incarne, se corporifie, dans l´acteur, créant une certaine qualité d´état, de présence…
J.J. M. : Faites-vous un travail particulier avec le corps des acteurs ? Est-ce un corps « travaillé » mis en scène, esthétisé, ou un corps « normal », quotidien ?
A.A. : Il existe un autre état que le corps quotidien, mais je sens que chaque spectacle demande un état corporel, une présence, une vibration corporelle, distincts. C´est la vibration qui produit une forme esthétique… et c´est très différent de partir de la forme plutôt que de créer une pulsation, une vibration !
Par exemple, le « Livro de Jó » avait besoin de viscéralité, un état viscéral plus intéressant par les vibrations que par une forme esthétique. Pour « Apocalipse 1,11 » il a fallu trouver au niveau du corps quelque chose de l´ordre de l´insanité, de la folie, comme si c´était un état limite, border-line, un va-et-vient permanent entre la réalité et son au delà. D´où la nécessité d´acteurs qui aient une certaine maturité et de l´audace.
J.-J. M : Comment choisissez-vous les acteurs ? Quelle est leur place dans ce processus de création ?
A. A. : Il y a un groupe fixe d´acteurs et, à chaque fois, intégration de nouveaux : ils viennent pour la plupart des stages que nous faisons, notamment au moment de la création d´un spectacle. Ils ont donc déjà pratiqué notre méthode de recherche : comme un aspect de notre travail c´est le témoignage personnel, critique, nous ne pouvons pas avoir un acteur exécutant mais un acteur créateur, critique, penseur, qui fait des propositions, se met à l´intérieur du travail. Naturellement, cela demande un autre positionnement : à se confronter avec des espaces non conventionnels, il y a inévitablement un élément de risque.
Risque physique et aussi psychologique : dans « BR3 », la possibilité de tomber dans le fleuve existe et fait partie du travail. Quand nous entrons dans un hôpital [[ Spectacle « Livro de Jó », à l ´Hôpital Humberto 1er, São Paulo.]], l´atmosphère du lieu nous affecte et tous sont traversés par ça. Au DOPS[[Prison de São Paulo où la dictature torturait les prisonniers « poitiques » et où a été créé le spectacle « Apocalipse 1,11 »]], quand nous avons commencé c´était très difficile, à cause de l´atmosphère du lieu : les répétitions duraient une ou deux heures et nous n´avions plus d´énergie… Or nous avions l´habitude de faire de longues répétitions sans nous fatiguer ! Tous ces éléments créent un état de présence de l´acteur qui est autre, et tout cela apparaît autant dans le processus de création que durant les représentations : c´est ça le danger, le risque. Il y a un aspect complètement lié à la Performance là.
Par ailleurs, notre travail est un vrai travail de groupe : les décisions importantes sont prises collectivement : choix des projets, administration, tournées, finances… Dans la démarche de création, dans la première étape (3 mois environ), ce sont des improvisations dirigées par les acteurs eux-mêmes car ce sont eux qui les proposent. À la fin de chaque mois, on fait ce qu´on appelle un « étendoir » : on choisit les scènes, les images que l´équipe entière a préférées. Cet « étendoir » est filmé, l´auteur prend ce matériel, fait un choix et une proposition de texte à partir de lui. Les acteurs improvisent à nouveau et ainsi de suite…
Ce type de travail nous met tous dans une situation d´insécurité, de « non savoir ». C´est une situation de laisser-aller mais qui n´est pas passive parce qu´on est tout le temps en recherche. Il faut donc des acteurs complices qui acceptent de plonger ensemble, physiquement et psychologiquement, et ne demandent pas de réponses immédiates, précises.
J.-J. M. : Et, alors, la place du public dans votre démarche?
A. A. : À partir de la création d´ « Apocalipse 1,11 » nous avons opté pour une dynamique de la présence du public pendant le processus de création. Pendant la phase où nous avions déjà un certain matériau. Tous les vendredis nous faisions une espèce de bilan de la semaine et présentions toutes les scènes travaillées à des gens qui commentaient.
Tout cela a abouti à une période de deux ou trois mois de répétition ouverte pour tous ceux que ça intéressait. Il n´y avait pas de débat à la fin du spectacle pour ne pas forcer les gens à parler ni créer d´obligation : on laissait la porte ouverte pour qu´ils viennent parler avec nous ou nous écrivent.
Pour « BR3 » nous avons fait passer un questionnaire que les gens remplissaient s´ils voulaient. Mais comme ils allaient jusqu´au fleuve Tiétê et qu´ensuite nous les ramenions jusqu´au Mémorial da América Latína, ils avaient le temps et pratiquement 99% écrivaient quelque chose. On parle beaucoup du triangle acteur-metteur en scène- auteur, mais je perçois le public comme un autre vecteur, qui, de fait, interfère. Bien sûr que je faisais un tri, mais dans la plupart des fois les suggestions et les problématisations amenaient des choses très intéressantes.
D´ailleurs je vais dire un secret : je suis le premier à prendre les questionnaires dès que se termine le spectacle et je ne dors pas avant de les avoir tous lus et faire une synthèse de ce qui est pour la scénographie, la musique, les acteurs… et le lendemain je passe tout pour les différents secteurs.
Dans ce sens le public a un rôle créatif. Pas de récepteur, qui crée l´oeuvre dans sa tête au fur et à mesure qu´il y assiste, comme l´idée de « l´oeuvre ouverte » d´Umberto Eco, non, je parle d´un aspect créatif plus concret : il fait en sorte que notre travail se modifie !
J.-J. M. : De spectacle en spectacle, s´est affirmée fortement une esthétique « Teatro da Vertigem » et votre travail, justement, a un lien très fort avec la réalité brésilienne du moment. Comment cela interfère-t-il sur vos choix esthétiques ?
A. A. : Ma sensation c´est que ce plongeon dans la réalité (recherche de terrain, répétitions dans la rue, contacts avec les gens…) stimule notre imaginaire, entre dans nos corps… Il provoque, de lui-même, une condensation esthétique, une pulsion et pas une décision a priori, antérieure et volontaire. Au début du processus je ne sais pas quelle forme aura le spectacle. Avoir une forme, un concept, une idée que je présente au début des répétitions aux acteurs, je sais faire et je le fais quand je monte un opéra, car en 2 semaines de répétitions on n´a pas le temps d´explorer. Mais au « Teatro da Vertigem », on ne travaille pas comme ça, on se met en risque, en défi. Comme metteur en scène je me transforme, je me sens changé par le processus car je me mets en situation de risque, de ne pas savoir, de lâcher- prise. En fait les choses se découvrent au fur et à mesure, et ensemble… Mettre la main à une situation, un quartier, ça nous contamine peu à peu, ça nous salit, ça génère une autre réalité. Je n´ai rien contre la scène à l´italienne, mais ce qui est important c´est de tenter une subversion de l´espace par le théâtre, comme si le théâtre pouvait occuper la ville, l´envahir, l´infiltrer, la miner, la déborder. La forme finalement se construit comme ça, entre nous tous.
J.-J. M. : L´espace social, public, a effectivement une place primordiale dans les spectacles du « Teatro da Vertigem ». Votre dernière création, en juin 2012, a le nom d´un quartier de São Paulo : « Bom Retiro 958 metros ». Pourquoi ce titre ? Quel en a été le point de départ ?
A. A. : Le spectacle est conçu comme une déambulation à travers le quartier Bom Retiro. 958 mètres, c´est la distance que le spectateur va parcourir du point de départ du spectacle, à travers les rues, jusqu´au centre culturel, à l´arrivée. Le point de départ de cette création, c´est le désir de parler du quartier de Bom Retiro, parce que c´est un quartier marqué par les différents flux migratoires : italiens, puis juifs, puis coréens puis boliviens… Chaque groupe nouvel arrivant remplace le groupe antérieur qui s´est enrichi et est parti vers des quartiers plus riches de São Paulo. Ce qui nous a intéressés c´est de parler des tensions qui existent dans les relations de travail entre les Coréens et les Boliviens : les Boliviens travaillent comme « esclaves » pour les Coréens. Pour les sociologues c´est en effet « un régime analogue à celui de l´esclavage » que le Brésil a connu par le passé : 16 heures de travail par jour, ils dorment sur place et n´ont aucune sécurité d´emploi. L´intérêt c´était donc cette transformation actuelle du quartier, historiquement lié au commerce populaire et qui, ces dernières années, veut devenir la rue Oscar Freire [[Rue três chic de São Paulo, avec commerces de luxe et marques internationales réputées.]] : il y a des boutiques qui veulent être chic, luxueuses… mais qui ne le sont pas. La question du consumérisme effréné, lié à l´augmentation du pouvoir d´achat, c´est un nouveau moment de l´économie brésilienne. Notre perspective est plus sociologique, urbanistique, qu´historique… même si notre projet initial pour ce spectacle était historique. À travers la progression du travail nous avons renoncé à cette perspective de « raconter l´histoire » du quartier parce que le plus intéressant nous a semblé être de parler du quartier « actuel ». Nous avons répété la plupart du temps dans le quartier, dans la rue, nous avons fait des workshops avec les gens du quartier et ceux qui transitaient par là… tout cela a permis une interaction fréquente et forte avec les habitants du quartier et ceux qui y travaillent.
J.J. M. : Et pour les autres spectacles ?
A.A. : Le « Livro de Jó » a été créé à un moment de dévastation à cause du Sida, qui correspondait à un moment de dévastation des infrastructures sociales (pas d´hôpitaux, problèmes de santé publique, un véritable chaos). Donc faire ce spectacle, c´était au-delà de la préoccupation métaphysique ce lien avec la réalité sociale de la ville de São Paulo. Le point de départ de « BR3 » a été la recherche sur une possible identité brésilienne, faite à partir de trois régions du pays : Brasilandia, Brasilia et Brasileia [[Brasilandia, près de São Paulo, Brasilia, capitale du Brési au centre-ouest du paysl, Brasileia , région de Acre, frontière avec la Bolivie. Le spectacle a été répété et a eu lieu sur le fleuve Tiétê, à S.Paulo, les spectateurs étant dans une embarcation au gré du fleuve.]]. Pendant, ce processus est devenue à chaque fois plus claire cette idée d´identité mobile, fluctuante comme le fleuve lui-même que vous n´arrivez jamais à prendre ni à matérialiser, parce que c´est une identité qui s´enfuit toujours, fluide comme l´eau elle-même. C´est comme si on pouvait parler d´identités instantanées, qui apparaissent pour disparaître à nouveau le moment suivant, se reforment, se précipitent à nouveau, pour qu´une trace identitaire puisse se réaliser à nouveau. L´espace du fleuve aide beaucoup, parce que vous n´avez pas de terre ferme, vous êtes tout le temps en mouvement, dans une barque qui se balance et est instable. Donc, voir notre identité à travers l´instabilité, le précaire, le fait d´être en constante transformation comme le fleuve lui-même qui passe, tout cela, d´une cetaine manière traduit cette discussion sur l´identité.
J.-J. M. : Le spectacle « Bom retiro 958 metros » a-t-il été répété dans le lieu lui-même, dans le quartier de Bom Retiro ?
A. A. : Ce spectacle est différent des autres. Habituellement nous répétons dans un endroit et après deux ou trois mois nous allons dans le lieu de représentation. Cette fois-ci les acteurs ont répété beaucoup dans le quartier, dans la rue, dès le début du processus… mais dans la rue ce n´est pas vraiment une répétititon parce que ça devient immédiatement représentation pour les gens qui sont là !… Quelques mois avant la première, nous avons choisi différents espaces (shopping, centre culturel, rues…) : c´était différent des autres spectacles où on avait des lieux déjà définis socialement : église, hôpital, prison… Cela a influencé le processus de construction du spectacle, ça a amené une dramaturgie urbaine liée à une partie de la ville : au début on est dans un shopping center, propre, pseudo chic, temple de la consommation. Et on termine dans un Centre culturel abandonné, chargé d´histoire. Il y a une structure dramaturgique urbaine qui se crée à partir de ce parcours ; il y a une inversion des valeurs caractéristique de notre société et que nous voulons montrer : valorisation du consumérisme et dévalorisation de la culture, de la mémoire culturelle. Ce centre culturel a été un moment fort de l´histoire du quartier et de São Paulo, un des épicentres de la culture judaïque de la ville . C´était la « Maison du Peuple » animée par des Juifs communistes, qui ont commencé à être persécutés par la dictature militaire. En 1968, ce théâtre était très actif, avec une grande force d´expérimentation et donc de provocation. En s´enrichissant, les juifs sont partis vers le quartier chic d´Higienópolis et ont abandonné le centre culturel. Du coup, faire du théâtre ici, dans ce théâtre, c´est faire oeuvre de mémoire, c´est le retour du refoulé ! Au début du travail, la population du quartier était étonnée mais peu à peu s´est créée une relation avec les gens: le fait de rester un bon moment dans l´endroit permet de vaincre les résistances et leurs commentaires créaient une espèce de feedback sur notre propre travail, tout au long de son évolution, dans la mesure où ce ne sont pas des gens de théâtre.
J.-J. M. : Vous n´êtes pas textocentriste, c´est clair. Mais, précisément à propos du texte de ce dernier spectacle, pouvez-vous parler de la dramaturgie de Joca Reiners Terron, l´auteur ? Quelle a été sa relation d´écrivain avec la mise en scéne dans un espace public ?
A. A. : Joca fait partie d´un mouvement littéraire qui englobe le Brésil, l´Argentine, l´Uruguay et le Paraguay et qui est celui du « portunhol » [[Langue faite d´um mélange de portugais et d´espagnol.]]. Nous avons pensé que, vu la configuration du quartier, ce mélange pourrait être incorporé au montage du spectacle. C´est un romancier reconnu. C´était sa première expérience d´écriture dramatique : il avait très envie de travailler avec nous et nous l´avons invité. Son texte dalogue avec l´expérience que le groupe a eue. Il a accompagné tout le travail, depuis les stages que nous avons donnés dans le quartier. Et a aidé à choisir l´ «étendoir » qui a été filmé (7 heures) : il a travaillé trois mois à partir de ce matériau brut et a fait la proposition d´un scenario. Il venait une fois par semaine, assistait au travail à partir de ses propositions, ensuite il y avait une discussion et il modifiait son propre texte et ainsi de suite…